La pratique pénale en images
La Praxis rerum criminalium – c’est-à-dire la Pratique des causes criminelles – est l’un des ouvrages de droit pénal les plus diffusés au 16e siècle. Son auteur, Josse de Damhouder (1507-1581), est un juriste flamand né à Bruges, qui y a notamment exercé comme avocat puis comme greffier à la cour criminelle.
L’éclatant succès de l’ouvrage doit moins à la qualité des développements, parfois médiocres et largement plagiés, qu’aux soixante-neuf gravures sur bois – toutes présentes dans l’exemplaire de l’Université – qui illustrent superbement les étapes successives de la répression des crimes.
L’une d’entre elles décrit une scène de torture judiciaire, dite question de l’eau, qui consiste à contraindre l’accusé, allongé pieds et poings liés sur un tréteau, à ingérer une grande quantité d’eau. La torture judiciaire, introduite en Occident au 14e siècle, n’est pas une peine appliquée à un coupable mais un mode de preuve destiné à déterminer la culpabilité d’un accusé par l’obtention d’aveux.
La question de l'eau, scène de torture judiciaire
L’usage de la question est strictement encadré par le droit, puisqu’elle ne peut intervenir que pour les crimes les plus graves et en présence d’indices sérieux. La question, qui ne peut être infligée qu’une seule fois pour une même infraction, est soumise au contrôle des juges, qui veillent notamment à ce qu’elle ne laisse aucune séquelle. C’est ce qui explique, sur cette gravure, la présence des magistrats au second plan, ainsi que la transcription par écrit des réponses données par l’accusé, versées au dossier.
Toutefois, les abus auxquels a donné lieu la question comme son efficacité douteuse ont conduit à un recul progressif de cette pratique dès avant son abolition définitive au nom des Lumières, en France, à la fin du 18e siècle.
Destinée avant tout aux praticiens du droit en Flandres (et par-delà de l’ensemble de l’Europe occidentale), la Praxis rerum criminalium décrit les différentes étapes de la procédure judiciaire – de la découverte d’une infraction à l’exécution de la sentence – et les peines afférentes à chaque délit.
Strasbourg, Bibliothèques de l’Université, 04-XVI-008
Praxis rerum criminalium, Josse de Damhouder, Anvers, 1562, in-quarto